François est parti il y a seulement 11j, et il devrait franchir le Cap de Bonne Espérance déjà demain… C’est dans les temps du record absolu en équipage, sauf que lui, il le fait en solo… Il vient de battre exploser le record des 24h en solo en réalisant, me semble t-il, le second temps toutes catégories confondues équipage compris… C’est totalement étourdissant, franchement incroyable, mais pas franchement inattendu.
Ce gars-là il prend la première fenêtre météo qui s’ouvre, il part sans trompette ni troubadour, commence par traverser le Gascogne à 36 noeuds de moyenne et arrive à transformer une fenêtre météo « bonne » en une opportunité exceptionnelle. Et oui, « la chance sourit aux audacieux » dit l’adage, et cet homme en est l’expression humaine la plus parfaite. Il navigue comme personne ne l’avait encore jamais fait, en étourdissant les compteurs avec le sourire et le pouce en l’air.
Cet homme quand tu le vois il a son objectif devant les yeux en permanence et on dirait que rien ne pourra l’en écarter. Pas de doute, pas de superflu, pas d’état d’âme. Il joue un métier d’équilibriste qui lui demande 3000 tours de manivelles / jour, de dormir à 40 noeuds dans un train sans rail dans une jungle humide, mais pour lui c’est naturel. Il faut réparer la galette de J1 ou la latte de GV ? Qu’à cela ne tienne, il le fait immédiatement sans attendre ni se faire des noeuds au cerveau. Bon, sans GV il avance quand même encore à 28 noeuds de moyenne hein ! Faut pas croire !
On ne se rend pas bien compte de la dureté de son entreprise depuis nos écrans d’ordinateur. Quand vous le voyez border ses voiles (et que vous l’avez fait à sa place avant) vous ne pouvez qu’être impressionné par sa détermination, il ne fait aucune concession à la performance. Le confort n’existe pas. Le chrono, lui, tourne et il court après, ou plutôt il lui montre la voie, simplement, avec pour seule arrogance son incroyable niveau de performance.
Et en plus, croyez moi, c’est un mec en or à terre comme en mer. Il a réuni autour de lui une constellation de personnes du même métal. Une super équipe comme on en croise rarement, discrète, efficace et soudée. Moi, il m’a donné la chance de ma vie de venir l’équiper sur The Bridge, je n’oublierai jamais ! Je suis tellement chanceux de pouvoir très humblement l’aider à bâtir son édifice de ma petite pierre.
Mais surtout, c’est un immense bonheur de le voir cavaler à toute allure dans les mers du sud sur son superbe oiseau et je ne souhaite qu’une chose, c’est que son capital chance reste au même niveau jusqu’à la fin de son tour du monde qui risque bien de boucler en 45 jours… C’est mon pronostic qui n’engage que moi, mais il en est capable, il a déjà 2 jours d’avance au bout du premier tiers pardi !
Bref, c’est pas pour rien que je le suis à la trace depuis que j’ai 8 ans. Lui qui m’avait prêté ses bouquins d’architecture navale avant mon bac et qui m’a décidé à faire des études d’ingénieur pour naviguer. J’ai une chance inouïe de pouvoir naviguer avec lui, car c’est tellement lucide que ça en devient facile.
Un mec en or assurément. En or « macif », évidemment.