Après avoir remporté The Foiling Week en Easy to Fly, Benoit a pris la route vers l’Allemagne pour participer à son premier Championnat d’Europe de Classe A. Après un entrainement très rapide sur ce nouveau support, Benoit a réussi à décrocher de jolis scores jusqu’à passer en seconde position la ligne sur une manche le troisième jour ! Son bateau étant en rôdage, ce championnat lui a permis de découvrir un nouveau support formateur et à détecter les améliorations techniques à travailler. 
Il termine 22ème sur 95 concurrents, retrouvez l’interview complet de Benoit ci-dessous ! 
Benoit, tu viens de finir ton premier championnat d’Europe en Classe A, peux-tu revenir sur ta course ? Ce championnat d’Europe de catamaran Classe A s’est déroulé à Warnemunde en Allemagne, sur un plan d’eau réputé pour ses vagues courtes et hautes… Et en effet la mer Baltique a été à la hauteur de sa réputation ! Ces conditions de vagues, corrélées à une fourchette de vent restreinte (le Classe A est vraiment super toilé, donc la limite supérieure est 20 noeuds, mais dans les vagues ça se passe mal… ne nous a pas laissé courir plus de 5 manches en 5 jours. Forcément dommage mais j’ai pu voir que j’étais dans le coup dans ces conditions de mer fortes que je découvrais (une excellente surprise !). J’avais un gros gros plus au portant où j’étais clairement l’un des plus rapides de la flotte sur les foils, j’arrivais à descendre plus que les autres en gardant le vol, ce qui m’a permis de faire des super manches, dont une de second, un truc de fou ! Au près aussi j’ai trouvé la vitesse le second jour, après avoir réparé mon taquet de rotation de mât… Le point négatif, c’est que j’ai un peu tout cassé sur le bateau. Il y a un gros travail de fiabilisation à faire. Ce bateau a 1 an, et je pense que je suis un peu plus agressif que les autres sur ma manière de naviguer, et le propriétaire précédent naviguait dans des conditions de mer plates qui chargent forcément moins le bateau. Et en plus quand on se fait un peu éclater dans les vagues on a vite fait de donner un coup au mauvais endroit, et les taquets ne tiennent pas trop le coup ! (je suis plutôt quelqu’un de doux je croyais !).Malheureusement pour moi j’ai une manche d’abandon qui rentre au classement final, sans quoi j’aurais certainement été dans le top 10 (mais avec des « si » on ‘est tous champions du monde hein!), et une manche où j’ai eu du mal à passer une marque dans le vent fort, où je fini 30e en ayant chaviré et eu de vrais problèmes. Mes autres manches sont donc 13, 8 et 2. On voit la progression de jour en jour et je reviens avec infiniment plus de connaissances qu’avant cette épreuve où je suis arrivé avec seulement 6 jours de navigation sur ce support… Donc un bilan ultra positif et le résultat final de 22e sur 95 concurrents reste un super score en étant en mode découverte. 
Quelles sont tes sensations nouvelles à bord du classe A ? 
Ce bateau est vraiment intéressant ! En plus d’être élégant, c’est un bateau des extrêmes : A la fois une machine hyper fine et ultra efficace dans du vent faible, qui permet de remonter le vent comme peu de bateaux, la coque frisant la surface dans à peine quelques noeuds de vent, en flottant, ou en volant par mer plate pendu à son câble de trapèze, ce grand mât au-dessus de la tête… Mais restez sur vos gardes, car il vous donne des sueurs froides dès que le vent monte ! En Allemagne le plan d’eau était extrêmement cabossé avec une mer bien plus forte que le vent et nos petit bateaux n’ayant pas de système de régulation de portance des foils (à la différence des moths) ce fut parfois compliqué… Imaginez-vous faire l’équilibriste au bout d’un câble de trapèze, lancé à plus de 20 noeuds à l’extérieur du bateau, quand celui-ci saute une vague, sort ses foils de l’eau, qui décrochent… Le bateau part en latéral sous la poussée vélique, (donc vous ne touchez plus vraiment la coque avec vos pieds) puis plante violemment les étraves dans la vague de devant et s’arrête net, et vous projette contre le câble d’étai à 4 mètres devant vous. Lors de la seconde manche, j’ai fais ça 3 fois d’affilé, puis en regardant autour j’ai vu que j’étais le seul à essayer de naviguer au trapèze ! Ceux qui aiment les fêtes foraines et les catapultes y trouvent leur compte, mais je vous assure qu’après avoir percuté les câbles et les foils avec toutes les parties de votre corps une dizaine de fois, (et malgré être super bien protégé par mes protections d’impact de ces Forward WIP !) et bien c’est un peu traumatisant et le soir il faut s’étirer et faire circuler tout ça. Bref, c’était un peu le carnage la journée ventée, mais je m’en suis vraiment bien sorti ! Je pense que mon expérience en foil sur le Moth est un énorme atout. J’aime aussi découvrir les fonctionnements différents, comme cette voile que l’on travaille uniquement en vrillage au portant (chariot bloqué) à la différence du Moth que l’on travaille uniquement en ouverture avec l’écoute, quand le hâle-bas est figé. Ca fonctionne différemment et les réactions sont différentes, l’équilibre général comme le pitch provoqué par le vrillage de la voile doit être compensé par la position de son corps… C’est super intéressant et ça m’éclate franchement d’apprendre et de découvrir ça, surtout que je pense avoir compris des trucs assez rapidement. Faire une manche de second devant notre maitre Glenn Ashby était absolument fantastique, j’ai bien navigué, et ça fait plaisir de voir que tout cela va dans le bon sens !! 
Après avoir navigué sur différents supports tu te lances en catamaran, qu’est-ce que cela t’apporte ? 
Cette année j’ai cherché à naviguer un maximum en variant les expériences : « DN » sur la glace, « Moth International », et catamarans « Easy to Fly » et « Classe A ». Tout cela me permet d’explorer le spectre de la voile de haute performance, découvrir des fonctionnements techniques différents et me battre contre des marins fantastiques de ultra haut niveau. Se mesurer aux meilleurs marins du monde c’est un challenge qui peut être dangereux, mais pour moi c’est une opportunité d’apprentissage. S’ouvrir l’esprit en travaillant mes sensations, c’est indispensable et c’est acquis pour la suite. Et même si certains peuvent penser que je me disperse à naviguer sur tous ces bateaux, sur le long terme c’est ultra enrichissant et je vois que je progresse à vitesse grand V. Je pense que je n’aurais jamais réussi à entrer à ce niveau de performance si je n’avais pas cette densité de course cette année. Naviguer sur la glace cet hiver m’a dé-stressé de la vitesse, le Moth m’a donné les clés de la navigation en Classe A dans les vagues, le réglage de twist de grand voile sur le Classe A m’aide à accélérer en ETF, naviguer avec Francois Gabart sur le trimaran MACIF l’an dernier m’a fait revoir ma manière d’appréhender les championnats cette année… Tout cela est lié et c’est une méthode qui me convient. C’est ça le principal ! Je garde à l’esprit que mon objectif est de constituer une équipe en Multi 50 après la route du Rhum. Et là, je me sens vraiment prêt pour cela ! 
Une anecdote sur la course ? 
A terre l’ambiance était géniale avec des personnalités fortes autour de moi. J’ai passé mon temps avec Glenn Ashby (17 titres de champion du Monde en catamaran, vainqueur de la Coupe de l’America, médaillé aux JO…) Paul Larsen (l’homme le plus rapide du monde à la voile sur Vestas Sailrocket avec un pic à 68 noeuds !), Kostas Trigonis (multiple champion du monde de catamaran) et d’autres. Bien entouré, à glaner des conseils et recevoir leurs compliments; Quand ils viennent vous féliciter et vous dire « well done buddy » et bien ça fait chaud au coeur ! Je me souviendrai longtemps de ces bords de portant à faire l’équilibriste dans les vagues, à la barre de ma machine lancée à toute allure, quand les autres concurrents flottent autour de moi, un sentiment super gratifiant d’avoir réussi mon pari ! 
Peux-tu nous raconter la suite de ton programme ? 
Je viens d’arriver en Suède, à Borstahusen juste en face de Copenhagen où vont commencer les championnats d’Europe de Moth International ! Retour à mon engin favori pour le 6ème et dernier championnat international de l’année. J’y vais avec l’envie de bien faire, mais sans pression, avec mon n°7 dans la voile (peut-être vais-je avoir le mojo que l’équipe de France a en ce moment ?!) Première navigation ici cet après midi, ça s’enchaine sans temps mort !